Est-il possible d'embaucher un auto-entrepreneur (désormais appelé "micro-entrepreneur") ? Comment s'offrir les services d'un auto-entrepreneur sans passer par la case CDI/CDD ? Est-ce vraiment sans risque ? Peut-on être salarié et auto-entrepreneur pour la même société ?
Réponse rapide : oui, une entreprise a la possibilité de faire appel à un micro-entrepreneur (ex "auto-entrepreneur"). Cette embauche, qui peut être ponctuelle ou régulière, se fera dans le cadre d'un contrat de prestations de services.
L'employeur devra toutefois veiller à ne pas traiter l'auto-entrepreneur – un travailleur indépendant – comme un salarié. Dans le cas contraire, le contrat de freelance liant les deux parties sera susceptible d'être requalifié en contrat de travail.
Le statut auto-entrepreneur : un régime simple d'accès pour lancer une petite activité indépendante
Lancé en 2009, le régime "micro-entrepreneur" (ex "auto-entrepreneur) permet à des particuliers de créer facilement une activité complémentaire, en jouissant d'une certaine autonomie vis-à-vis de leurs clients.
Voici les principales caractéristiques de ce dispositif :
Des cotisations sociales calculées en fonction du chiffre d'affaires ;
Une franchise en base en TVA au démarrage : l'auto-entrepreneur ne facture par la TVA à ses clients lorsqu'il lance son activité. En contrepartie, il ne peut pas récupérer celle-ci sur ses achats ;
Une comptabilité allégée, avec notamment l'absence d'obligation d'établir un bilan annuel.
Une entreprise a la possibilité d'embaucher un auto-entrepreneur
Quel contrat pour embaucher un auto-entrepreneur ?
L'auto-entrepreneur est un travailleur indépendant qui a la possibilité d'offrir ses services à tout type de structure : SAS, SARL, autre auto-entreprise, association,...
Sa mission s'effectue dans le cadre d'un contrat de prestation de services – aussi appelé contrat de mission indépendante ou contrat freelance.
Ce type de contrat fait intervenir deux parties : un indépendant (l'auto-entrepreneur) et son client (l'entreprise).
Contrat de prestation de services
Un auto-entrepreneur (le prestataire), qui va fournir un service
Une entreprise (le client),
qui va payer pour ce service
Il suffira à l'auto-entrepreneur, après avoir réalisé la prestation, de présenter une facture à l'entreprise cliente.
Celle-ci ne sera redevable d'aucune charge sociale : c'est l'auto-entrepreneur qui devra régler des cotisations, chaque mois ou chaque trimestre, en fonction de son chiffre d'affaires.
L’auto-entrepreneur prestataire est soumis à une obligation de résultat, et s’engage à respecter les délais précisé dans le contrat.
Il est également soumis à une obligation d’information, qui s’articule en 3 devoirs :
un devoir de conseil : le prestataire doit guider au mieux son client dans ses choix ;
un devoir de renseignement : il doit s'efforcer de découvrir ce que souhaite réellement son client ;
un devoir de mise en garde : il doit avertir son client des risques et des limites auxquels sa prestation pourrait faire face.
De son côté, le client devra payer le prix des prestations qui lui ont été fournies. S'il ne le fait pas, l'auto-entrepreneur pourra suspendre l’exécution du contrat et engager certaines procédures.
Quelles précautions prendre lors de la conclusion du contrat ?
Il est conseillé pour l’entreprise cliente d’établir un contrat avec l’auto-entrepreneur afin de s’assurer de la bonne marche de la prestation. Les deux parties pourront ainsi délimiter le cadre de leur relation (objet de la prestation, durée, modalités d’exécution, modalités de rupture,…).
Une fois que la prestation aura été effectuée, l’auto-entrepreneur sous-traitant présentera une facture à son donneur d’ordre.
Voici quelques conseils pour la rédaction du contrat de prestations de services :
Mieux vaut prévoir une rémunération forfaitaire basée sur le résultat fourni – pas sur le nombre d'heures de travail effectuées ;
Veiller à préciser les sanctions qui seront appliquées en cas d'inexécution de la prestation ;
Vérifier que le cocontractant est assuré, et qu'il est à jour dans la déclaration et le paiement de ses charges sociales et fiscales.
Auto-entrepreneur ou salarié ? Deux situations bien différentes
Pour remplir sa mission, l’auto-entrepreneur prestataire a, en théorie, les mains libres.
Même s’il est tenu de procéder à l’acquisition des outils nécessaires à l’accomplissement de sa mission, il a la possibilité :
d'organiser son planning comme il l'entend ;
de travailler dans les conditions qu'il souhaite ;
de contracter avec d'autres entreprises.
Il se trouve donc dans une situation fondamentalement différente de celle d'un salarié.
Tenu par un contrat de travail, ce dernier doit notamment respecter des horaires, suivre les directives données par ses supérieurs hiérarchiques (qui pourront contrôler la manière dont ses tâches seront effectuées et sanctionner ses éventuels manquements), respecter certaines clauses de son contrat,...
Contrat freelance : un mode recrutement attractif pour les entreprises
Embaucher un auto-entrepreneur : de nombreux avantages
Recruter un salarié, ça coûte cher : c’est le constat qui pousse un nombre croissant de sociétés à recourir à des contrats freelance, afin de proposer des missions à des auto-entrepreneurs prestataires de services. Elles sont ainsi susceptibles de réaliser des économies, tout en ayant la possibilité de mettre facilement fin à leur relation avec ces indépendants.
En effet, les cotisations sociales d’un travailleur indépendant sont moins élevées que celles d’un salarié. Ainsi, même si le donneur d’ordre offre une rémunération plus attractive à son prestataire, et va “compenser” financièrement le fait que l’auto-entrepreneur devra payer des charges, cela lui coûtera moins cher que s’il l’avait embauché dans le cadre d’un contrat de travail.
Par ailleurs, l’entreprise cliente ne s’engage que sur une courte période. Si l’auto-entrepreneur ne lui donne pas satisfaction, elle peut décider de ne pas lui proposer un nouveau contrat freelance.
De nombreuses entreprises s’appuient d’ailleurs sur un modèle d’affaires s’articulant autour d’auto-entrepreneurs prestataires de services. C’est notamment le cas de plusieurs sociétés de livraison de repas, comme Deliveroo ou UberEats, dont les livreurs sont tous des travailleurs indépendants.
On retrouve également fréquemment cette tendance dans certains secteurs, où il est courant de s’appuyer sur des auto-entrepreneurs pour externaliser des missions :
le BTP ;
la restauration ;
la formation ;
les médias ;
le conseil ;
etc.
Attention aux abus !
Le problème ?
Certains employeurs indélicats peuvent être tentés d’abuser de ce dispositif :
En faisant appel à un auto-entrepreneur plutôt que de recruter un salarié sur un poste précis. Ils peuvent également se servir de ce statut comme d'une "super période d'essai", en proposant un contrat de plusieurs mois à un auto-entrepreneur. Ceci va leur permettre de tester les capacités d'un futur salarié, pour une période plus longue que ce qu'autorise la loi pour une période d'essai ;
En proposant à l'un de leurs salariés en CDI de basculer en auto-entrepreneur pour pouvoir bénéficier d'un contrat de prestation de service mieux rémunéré. Ces employeurs peuvent également être tentés de proposer à un salarié des missions supplémentaires, mais cette fois en tant qu'auto-entrepreneur, plutôt que de lui offrir la possibilité d'effectuer des heures supplémentaires ;
En licenciant un salarié avant de lui proposer certaines missions en tant qu'auto-entrepreneur : ce licenciement pourrait être remis en cause devant les tribunaux.
On pense également aux cas où des prestataires vont réaliser des tâches similaires à celles d'un salarié, sans la moindre autonomie.
Certaines entreprises parviennent ainsi à s'affranchir des règles rigides du droit du travail, tout en évitant d'avoir à régler des cotisations sociales. Dès lors, le travailleur, faussement indépendant, est privé des nombreux avantages dont peut jouir un salarié :
congés payés ;
droits au chômage ;
indemnités journalières en cas de maladie ;
conditions préalables au licenciement ;
mécanismes d'intéressement et de participation ;
droits à la formation ;
...
Ces dérives, qui inquiètent les pouvoir publics, semblent contribuer à une précarisation des travailleurs.
Des auto-entrepreneurs vraiment indépendants ? Le spectre du salariat déguisé
Comme nous l’avons vu, une entreprise peut parfaitement s’offrir les services de travailleurs indépendants.
Elle devra toutefois respecter plusieurs règles afin d’éviter que cette relation contractuelle ne soit susceptible d’être requalifiée en contrat de travail.
Le lien de subordination : un concept essentiel dans la requalification en contrat de travail
Ce qu'il faut comprendre, c'est qu'un salarié renonce à son indépendance, à travers :
la signature d'un contrat de travail ;
ou un comportement ne laissant aucun doute sur le fait qu'il accepte une relation de subordination vis-à-vis de l'entreprise qui l'emploie.
Notons qu'il aura la possibilité de se défaire de ce lien en donnant sa démission.
Le lien de subordination n'étant pas évoqué dans le Code du travail, voici la définition qu'en donne la Cour de cassation (1) :
Le lien de subordination est caractérisé par l'exécution d'un travail sous l'autorité de l'employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d'en contrôler l'exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné. Le travail au sein d'un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l'employeur détermine unilatéralement les conditions d'exécution du travail.
Cour de cassation
L'autonomie nécessaire du prestataire indépendant
À l’inverse, il ne doit y avoir aucun lien de subordination juridique entre le client donneur d’ordre et son prestataire.
Ainsi, un auto-entrepreneur qui signe un contrat de prestation de services doit rester indépendant : il ne doit pas être considéré comme un salarié. Il ne doit pas être soumis à l’autorité de l’entreprise, et doit pouvoir agir en parfaite autonomie.
S’il l’administration ou les juridictions estiment qu’une entreprise “emploie” un micro-entrepreneur dans les mêmes conditions qu’un travailleur salarié, elles pourront considérer qu’il s’agit d’une situation de salariat déguisé. Le contrat de prestation pourra alors être requalifié en contrat de travail, et l’entreprise coupable devra faire face à de lourdes conséquences financières.
Bon à savoir : L'existence d'un lien de subordination ne dépend pas de la volonté des cocontractants, ni de la nature du contrat qu'elles ont décidé de signer. Selon la jurisprudence, ce sont plutôt les "conditions de fait dans lesquelles est exercée l'activité du travailleur" qui permettent de mettre en lumière son manque d'indépendance.
Autrement dit, peu importe qu'un travailleur soit considéré, sur le papier, comme un indépendant : seule la réalité de son travail compte.
Des auto-entrepreneurs cherchent à faire requalifier leur contrat
Avec la démocratisation du statut auto-entrepreneur et la prolifération de plateformes de mises en relation, les travailleurs indépendants sont de plus en plus nombreux à tenter d’obtenir une requalification en contrat de travail.
Au vu du manque d’autonomie dont ils bénéficient, certains d’entre eux estiment que leur situation constitue, de fait, une relation entre un salarié et un employeur, sans les avantages qui devraient s’y rapporter – et cherchent ainsi à obtenir réparation.
Si vous souhaitez en savoir plus, voici trois cas relativement récents dans lesquels des auto-entrepreneurs ont obtenu gain de cause :
Décembre 2016 : le Conseil de Prud'hommes de Paris donne raison à un chauffeur auto-entrepreneur
Un chauffeur auto-entrepreneur avait attaqué une société de transport de voyageurs, estimant qu'il n'était pas indépendant dans l'exercice de son activité.
Le Conseil de Prud'hommes de Paris avait décidé de requalifier cette relation en contrat de travail, en s'appuyant notamment sur le fait que la société interdisait à ce chauffeur d'offrir ses services à des sociétés concurrentes.
L'homme a pu ainsi obtenir, au total, plus de 27 000 euros de rappels de salaire et d'indemnités.
Mars 2018 : un ouvrier démissionne et poursuit son activité en tant qu'auto-entrepreneur – sa situation est requalifiée en contrat de travail
Sous la pression de son employeur, une entreprise d'abattage, un ouvrier salarié avait accepté de démissionner pour proposer ensuite ses services en tant qu'auto-entrepreneur, en facturant ceux-ci à l'heure.
Il avançait qu'il était toujours salarié de fait : il devait réaliser des tâches identiques à celles des autres salariés, en étant soumis aux même contraintes qu'eux. Il devait par ailleurs utiliser sa pointeuse.
De son côté, la société estimait que son ouvrier n'était soumis à aucun lien de subordination, et qu'elle ne pouvait ni le contrôler ni le sanctionner.
Dans un arrêt rendu le 22 mars 2018, la Cour de cassation avait décidé d'invalider l'arrêt de la Cour d'appel, qui avait refusé de requalifier le contrat de sous traitance en contrat de travail.
Novembre 2018 : un livreur auto-entrepreneur ayant travaillé avec la société Take Eat Easy demande une requalification de son contrat
Un coursier auto-entrepreneur, qui proposait ses services à la société de livraison de repas Take Eat Easy, avait saisi le Conseil de Prud'hommesdans le but d'obtenir une requalification de sa relation contractuelle en contrat de travail.
La Cour d'appel avait rejeté sa demande, au motif qu'il était parfaitement autonome et n'était tenu à aucun lien d'exclusivité.
Son arrêt avait été invalidé le 28 novembre 2018 par la Cour de cassation, qui avait décidé de mettre en avant un pouvoir de direction et de contrôle démontrant l'existence d'un lien de subordination – et ce même si le livreur auto-entrepreneur jouissait d'une liberté totale pour établir son planning.
Ce lien s'appuyait sur deux éléments :
Le livreur était suivi en temps-réel par une application, à travers un système de géolocalisation. Il était ainsi possible de connaître en permanence sa position géographique, mais également le nombre de kilomètres qu'il avait parcouru ;
Take Eat Easy avait mis en place un système de bonus-malus lui permettant de disposer d'un pouvoir de sanction à son égard – des sanctions pouvant aller jusqu'à la suppression de son compte sur la plateforme.
Quelles précautions doit prendre une entreprise qui souhaite s'offrir les services d'un auto-entrepreneur ?
Vous travaillez pour une entreprise, et vous aimeriez vous offrir les services d’un auto-entrepreneur dans le cadre d’un contrat de prestation de services ?
Vous devez vous assurer que cet auto-entrepreneur reste bien un prestataire extérieur, afin d’éviter que cette relation contractuelle ne soit requalifiée en contrat de travail. Efforcez-vous de dissiper, dès le départ, toute ambiguïté.
Notez que l’absence d’autonomie de l’auto-entrepreneur sera établie par l’inspection du travail ou l’Urssaf sur la base d’un faisceau d’indices, qui tendront à démontrer l’existence d’un lien de subordination entre les deux cocontractants.
Voici quelques points concrets à surveiller :
Faites vous appel aux services d'un ancien salarié devenu auto-entrepreneur ?
C'est ce que peuvent être tentées de faire de nombreuses entreprises : suggérer à un salarié fraîchement licencié d'opter pour le statut auto-entrepreneur afin de lui proposer des missions.
L'administration pourrait être amenée à considérer que ce choix a été imposé par l'entreprise – une entreprise qui peut ainsi limiter ses coûts, tout en s'attachant les services d'un employé expérimenté.
Et même si l'auto-entrepreneur pourra en contrepartie tenter de négocier à la hausse ses honoraires, le fait de travailler pour son ancienne entreprise en tant qu'indépendant impliquera une diminution de ses droits (chômage, congés pays et maladie, formation,...) ainsi qu'une précarisation.
Êtes-vous son unique client ? Si oui, recherche-t-il activement d'autres clients ?
Même si ce critère ne sera sans doute pas suffisant à lui seul, on comprend qu'il est difficile de penser qu'un auto-entrepreneur est totalement autonome s'il n'offre, pendant une longue période, ses services qu'à un seul et unique client.
La dépendance économique dans laquelle il se trouve pourrait venir apporter du crédit à un potentiel lien de subordination.
Quand est-ce que cette personne s'est déclarée pour la première fois auto-entrepreneur ?
Attentions aux dates ! Si l'auto-entrepreneur avec lequel vous contractez vient tout juste de lancer son activité, les risques de requalification sont plus importants.
En effet, votre société pourra être soupçonnée d'avoir incité ce prestataire à créer son auto-entreprise pour lui proposer des missions en freelance, alors que celui-ci souhaitait à l'origine obtenir un contrat de travail.
Votre prestataire est-il soumis à des horaires et à une obligation de présence ? Ses dates de congé lui-sont elles imposées ?
L'auto-entrepreneur doit réaliser une prestation, avec une contrainte de temps.
Mais pendant la durée du contrat, il est libre de s'organiser comme il le souhaite : choix de ses horaires, de ses dates de congés,...
C'est d'ailleurs cette autonomie qui doit théoriquement lui permettre de prospecter d'autres clients, favorisant ainsi la viabilité de son activité.
Contrôlez-vous de manière continue les tâches accomplies par l'auto-entrepreneur ? Exigez-vous des comptes-rendus réguliers ?
Il est formellement interdit pour l'entreprise cliente de contrôler le travail effectué par l'auto-entrepreneur pendant sa mission.
Elle ne peut donc pas lui demander régulièrement de rendre des comptes, comme serait habilité à le faire un employeur.
En cas de désaccord au terme de la mission, il convient pour les deux parties de tenter de s'entendre pour faire en sorte que le résultat produit par le prestataire soit conforme à ce qui était décrit dans le contrat.
Décidez-vous de la manière dont votre prestataire doit effectuer son travail ? Est-il libre de son mode d'organisation ?
Toujours dans le souci de conserver une certaine autonomie, le travailleur indépendant doit pouvoir choisir les différentes tâches qu'il va réaliser afin d'offrir un résultat conforme à celui exprimé par son client.
Même dans les cas où il est prévu qu'il travaille dans les locaux de son client, ce dernier ne devra pas lui imposer des modalités d’exécution.
Exemple : Un auto-entrepreneur a signé un contrat de prestation de services qui consiste à concevoir un logo pour une entreprise. Si rien n'est précisé à ce sujet, il aura la possibilité de choisir l'outil qu'il souhaite pour créer ce logo (Photoshop, logiciel en ligne,...), d'utiliser le type d'ordinateur qu'il préfère (Mac ou PC),...
De son côté, un salarié pourra être contraint de s'appuyer sur un logiciel ou du matériel spécifique pour réaliser cette tâche.
Sur quels éléments repose sa rémunération ?
C'est à l'auto-entrepreneur d'établir la base de sa facturation. Celle-ci peut être liée au nombre d'heures travaillées (ce qui reste toutefois plutôt déconseillé), à un forfait précis, à la nature des outils qu'il a dû utiliser pour remplir sa mission,...
Même si l'entreprise a la possibilité de négocier ces honoraires, elle ne doit pas, en théorie, choisir les éléments sur lesquels cette rémunération sera calculée. Typiquement, le fait qu'une entreprise décide d'imposer une grille de rémunération à tous ses prestataires pourrait s'apparenter aux usages d'un employeur.
Voici enfin d'autres points sur lesquels il convient d'être attentif :
L'auto-entrepreneur utilise-t-il son propre matériel pour réaliser ses prestations ? Doit-il obligatoirement porter une tenue spécifique ?
Est-il susceptible d'être sanctionné en cas de manquement ?
Est-il en contact permanent avec d'autres salariés de votre entreprise ?
A-t-il la possibilité de prendre des initiatives ?
L'auto-entrepreneur dispose-t-il d'une carte de visite ou d'une adresse mail délivrées par votre entreprise ?
En résumé : l'auto-entrepreneur, en sa qualité de travailleur indépendant, doit pouvoir accomplir sa mission comme il l'entend, sans être soumis à un lien de subordination vis-à-vis de son client.
Attention : Vous devez également, conformément à l'article D 822-5 du Code du travail, vous assurer, pour toute opération qui dépasse les 3 000 euros, que votre prestataire est parfaitement en règle avec la déclaration et le paiement de ses cotisations sociales.
Si ce n'est pas le cas, vous pourriez être déclaré solidairement responsable des cotisations dont il est redevable.
Quelles sanctions si l'auto-entrepreneur est reconnu salarié de fait ?
Les pouvoirs publics prennent les situations de salariat déguisé très au sérieux, et n’hésitent pas à condamner fermement les entreprises qui en sont coupables.
Si elle parvient à démontrer l’existence d’un lien de subordination entre un auto-entrepreneur et une entreprise cliente, l’administration (l’inspection du travail, l’Urssaf…) aura la possibilité de requalifier ce contrat de mission en contrat de travail – avec de lourdes conséquences financières à la clé.
Ajoutons que seule l’entreprise cliente peut faire l’objet de poursuites. Si l’auto-entrepreneur faussement indépendant a la possibilité d’obtenir réparation, il est toutefois également susceptible de devoir rembourser les aides et les allocations indûment perçues au cours de sa mission.
Notez que toutes ces décisions pourront être contestées devant les tribunaux.
Entreprise donneuse d'ordre : des sanctions lourdes
Les entreprises qui décident d’embaucher des auto-entrepreneurs faussement indépendants risquent gros en cas de conflit ou de dénonciation.
En effet, le Code du Travail dispose qu’une telle démarche peut consister à se soustraire intentionnellement aux obligations d’un employeur vis-à-vis de son salarié (2).
Voici une liste des risques encourus par une entreprise qui embauche un “faux indépendant” :
Si l'on estime qu'il a cherché sciemment à contourner l'application du Code du Travail, des sanctions pénales peuvent être infligées à l'employeur pour délit de travail dissimulé (exposant à une peine de 3 ans d’emprisonnement et au versement d'une amende de 45 000 euros). Notez que cette peine est susceptible d'être doublée en cas de récidive ou d'abus de vulnérabilité ;
Le paiement de l''ensemble des salaires, des cotisations et des indemnités (congés payés, heures supplémentaires, primes et indemnités de toute nature) qui auraient dû être réglés depuis le début avéré de la relation contractuelle, en se basant sur un poste salarié équivalent dans l’entreprise (3) ;
Le paiement d'indemnités de licenciement si l'entreprise a mis un terme à la relation qui la lie à l'auto-entrepreneur (4). Elle s'expose également au versement de dommages et intérêts sur la base d'un préjudice moral ou matériel.
Auto-entrepreneur prestataire : une victime de la situation
De son côté, l’auto-entrepreneur ne risque aucune poursuite judiciaire : il est considéré comme une victime de cette situation.
Pour autant, même s’il pourra prétendre au versement d’indemnités, la requalification de sa mission peut avoir des conséquences fâcheuses. Il pourra ainsi être soumis à différentes régularisations, en étant notamment contraint de rembourser les allocations chômage et les aides sociales qu’il aurait indûment perçues au cours de sa mission.
Recrutement d'un auto-entrepreneur par une entreprise : questions fréquentes
Vous vous posez encore des questions au sujet de l’embauche d’un auto-entrepreneur ?
N’hésitez pas à dérouler les onglets ci-dessous afin d’en savoir plus.
Une entreprise peut-elle embaucher un auto-entrepreneur ?
Oui, une entreprise peut recruter un auto-entrepreneur dans le cadre d'une mission freelance.
Elle ne devra toutefois pas le traiter comme un salarié : ne pas lui imposer des horaires de travail, ne pas contrôler la manière dont ses tâches seront effectuées,...
Quels sont les sanctions si l'embauche d'un auto-entrepreneur est considérée comme du travail dissimulé ?
La relation qui unit le client et son prestataire auto-entrepreneur sera alors requalifiée en contrat de travail.
L'employeur s'exposer à plusieurs sanctions :
à une peine pouvant aller jusqu'à 45 000 euros d'amende et 3 ans d’emprisonnement ;
au paiement des salaires, cotisations et indemnités qui auraient du être versés si l'auto-entrepreneur avait été salarié ;
au versement d'indemnités de licenciement et dommages et intérêts.
Peut-on être salarié et auto-entrepreneur pour la même société ? Un salarié peut-il facturer son employeur ?
Non : il est interdit d'être à la fois auto-entrepreneur et salarié pour la même société.
La raison ? Ces deux rôles sont incompatibles : l'auto-entrepreneur doit être autonome vis-à-vis de son prestataire, tandis que le salarié est tenu par un lien de subordination à l'égard de son employeur.
Une société ne peut donc pas proposer des missions indépendantes à un salarié – celles-ci pourraient être considérées comme des heures supplémentaires "déguisées". Elle s'exposerait alors à des sanctions judiciaires.
Peut-on travailler avec son ancien employeur après un licenciement ou une rupture conventionnelle ?
Il arrive parfois qu'un ex-salarié, après avoir décidé de créer son-entreprise, décide de retravailler avec leur ex-employeur.
Cela peut poser problème si cette relation constitue la majeure partie de son activité : l'ancien salarié est-il véritablement indépendant ? L'employeur n'a-t-il pas mis fin à son contrat de travail pour pouvoir le réengager en tant que freelance ?
Les deux parties pourraient être accusées de collusion d'intérêt (une entente secrète visant à nuire à des tiers) :
l'ancien salarié y trouverait un moyen d'obtenir des droits au chômage tout en générant des revenus d'auto-entrepreneur (avec des charges diminuées de moitié lors des 4 premiers trimestres d'activité, via l'ACRE) ;
l'ancien employeur y trouverait un moyen de réduire ses coûts : même en proposant une rémunération horaire plus élevée à son ancien salarié, il n'aurait aucune charge à régler.
Auto-entrepreneur, je pense me trouver dans une situation de salariat déguisé. Que dois-je faire ?
Si vous constatez que certaines irrégularités entourent votre relation avec une entreprise cliente, n'hésitez pas à contacter le Conseil de Prud'hommes de votre département ou l'Urssaf.
Notez que vous devrez disposer d'éléments concrets pour tenter de mettre en lumière l'existence d'un lien de subordination et obtenir ainsi une requalification.
Que se passe-t-il si l'auto-entrepreneur doit réaliser des dépenses particulières pour le compte de son client, dans le cadre de sa prestation : matériel, matières premières,... ?
En tant qu'auto-entrepreneur, vous ne pouvez pas déduire vos charges. En avançant des frais pour votre client, puis en les lui refacturant, vous allez faire gonfler artificiellement votre chiffre d'affaires (et donc ses charges sociales et fiscales).
Il existe toutefois une solution : les frais de débours, un dispositif qui va vous permettre d'avancer des dépenses pour le compte de votre client sans que leur remboursement ne fasse augmenter votre chiffre d'affaires.
Quel contrat signer pour embaucher un auto-entrepreneur ?
L'entreprise qui souhaite recruter un auto-entrepreneur devra lui faire signer un contrat de prestation de services.
Elle n'aura pas de charges sociales à régler dans le cadre de ce contrat.
Conclusion
Comme nous avons pu le voir, une entreprise peut parfaitement embaucher un auto-entrepreneur pour réaliser une prestation de services, à travers un contrat de freelance.
L'entreprise devra cependant s'efforcer de ne pas traiter cet auto-entrepreneur comme un salarié, et de lui offrir une véritable autonomie. Dans le cas contraire, elle s'expose à une requalification du lien qui l'unit à son prestataire en contrat de travail, avec des sanctions à la clef.
Vous souhaitez nous poser des questions relatives à l'embauche d'un auto-entrepreneur au sein d'une entreprise ? Vous voulez nous faire part de certaines remarques ?
N'hésitez pas à utiliser l'espace commentaires ci-dessous pour nous solliciter.
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Bonjour
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Ont-ils le droit ?
Il ne s’agit pas d’une “requalification” à proprement parler, puisque celle-ci doit être prononcée par un juge.
Oui, l’entreprise peut parfaitement vous proposer un contrat de travail payé au SMIC. Votre relation précédente n’était pas liée à un contrat de travail, mais à un contrat de prestations de services.
En revanche, vous avez la possibilité d’attaquer l’entreprise si vous estimez que votre relation contractuelle précédente constituait une situation de salariat déguisé. Vous devrez démontrer qu’il existait un lien hiérarchique entre vous et l’entreprise, grâce à un faisceau d’indices (il s’agit de votre unique client, vous étiez soumise à des horaires et une obligation de présence, l’entreprise contrôlait de manière continue votre travail,…).
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Cordialement,
David